Les formateurs sous-traitants doivent-ils avoir un numéro de déclaration d’activité ?

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Les formateurs sous-traitants doivent-ils avoir un numéro de déclaration d’activité ?

Un sous-traitant a-t-il obligation de solliciter un numéro de déclaration d’activité (NDA) auprès de l’administration du Ministère du Travail ? Le débat n’est visiblement pas tranché sur la question. A l’origine de celui-ci, les consignes données par la plupart des DREETS à partir du guide à l’usage des organismes de formation professionnelle, lire par exemple en page 21 celui de PACA : 

https://paca.dreets.gouv.fr/sites/paca.dreets.gouv.fr/IMG/pdf/guide_a_l_usage_des_organismes_de_formation_professionnelle-2.pdf :

« Lorsqu’un organisme de formation ne peut pas assurer tout ou partie d’une formation, il peut conclure un contrat de sous-traitance avec un autre prestataire de formation. Ce contrat porte sur une formation clairement déterminée, dans son contenu comme dans sa durée. Chaque partie au contrat en conserve un exemplaire, daté et signé. Le donneur d’ordre garde la responsabilité contractuelle de la formation dispensée par le sous-traitant. Le sous-traitant établit une facture et se fait payer, après réalisation de la prestation, sous forme d’honoraires. Il a obligation de demander un numéro de déclaration d’activité. Il est immatriculé au registre du commerce et des sociétés avec un numéro SIRET ». On retrouve très exactement le même texte dans la plupart des guides publiés par les DREETS dans leurs régions respectives. Cela étant, certains juristes contestent le bien-fondé de cette interprétation car elle ne serait pas clairement inscrite dans la loi : Village Justice.com : https://www.village-justice.com/articles/dans-domaine-formation-professionnelle-sous-traitant-doit-obligatoirement,44361.html ou encore Aurélie Joubert : https://www.aurelie-joubert.fr/droit/le-nda-est-il-reellement-obligatoire-lorsque-lon-intervient-en-sous-traitance/

Bon, alors, qui croire ? Le Ministère du Travail ? Les juristes, avocats spécialisés en droit public ?

Au milieu de ce brouhaha, nous avons donc tenté de nous faire notre petite idée. Il est vrai qu’à première lecture transversale du texte de loi, on peut se laisser entraîner vers un doute sur cet aspect des choses. Mais si on analyse la phrase, la réponse y est très claire, en effet. Allons donc voir ce que dit la loi.

L’article L6351-1 du Code du Travail, modifié par la loi du 5 septembre 2018 précise que : « toute personne qui réalise des actions de formation, dépose auprès de l’autorité administrative une déclaration d’activité, dès la conclusion de la première convention de formation professionnelle ou du premier contrat de formation professionnelle ».

La question à se poser pour le formateur sous-traitant est : réalise-t-il des actions de formation ? Si la réponse est oui, alors l’article L6351-1 s’applique. Point barre !

Si la réponse est non, c’est sans doute que le sous-traitant réalise autre chose qu’une action de formation, par exemple, une conférence sur un thème donné, un témoignage d’expert, une animation, etc.

Il est vrai que pour l’heure, aucun tribunal administratif ne semble avoir été saisi pour contester cette disposition. A l’inverse, il semble ne pas y avoir non plus de précédent en matière de poursuites ou d’interdiction d’exercer en direction de sous-traitants non titulaires d’un numéro de déclaration d’activités. Soyons donc tranquilles, la police ne viendra pas toquer à notre porte demain matin !

Car il faut également tenir compte d’une pratique des organismes de formation qui consiste à faire appel à des professionnels détenteurs d’une spécialité du fait de leur cœur de métier. Et on peut les comprendre, car quel meilleur intervenant que des professionnels experts de leur métier pour transmettre leurs savoir-faire ? Sauf que, très souvent ces professionnels ne s’identifient pas comme des formateurs, surtout lorsqu’ils interviennent très occasionnellement. Si le texte devait être strictement appliqué tel qu’il est écrit, cela soulèverait de nombreuses incompréhensions et serait dommageable à la qualité des formations d’une manière générale. Par conséquent, le silence qu’impose la réponse à notre question permet de conserver une forme de paix sociale. Oui, mais pour combien de temps ?

En effet, il semblerait que cela ne devrait pas rester en l’état de manière éternelle, car la tendance aujourd’hui semble plutôt pencher du côté d’une obligation de déclaration des sous-traitants, si l’on en juge l’article 6323-9-1 du Code du travail, issu de la loi n°2022-587 du 19 décembre 2022 visant à lutter contre la fraude au CPF : « les sous-traitants devront désormais respecter les mêmes conditions que celles exigées de l’organisme de formation donneur d’ordre afin d’être référencés sur le portail “Mon Compte Formation”. En cas de manquement du sous-traitant, le donneur d’ordre pourra être déréférencé. »

Certes, cette nouvelle obligation est délimitée aux organismes de formation qui émargent sur les fonds du CPF, mais on pourrait penser qu’elle préfigure une généralisation progressive de cette disposition à l’ensemble du secteur de la formation professionnelle continue. Attendons donc la suite de l’épisode dans quelques semaines…

Raymond BANO

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